3e dimanche de paques

L’Evangile proposé pour ce dimanche est la fameuse rencontre des disciples d’Emmaüs avec Jésus. C’est le plus long récit que les évangiles nous proposent d’une apparition de Jésus après sa résurrection. Je vous invite à le lire, en Luc 24, 13-35 https://www.aelf.org/2020-04-26/romain/messe .

On le pressent : il y a toute une pédagogie de la part de Jésus, dans sa manière de se manifester vivant auprès de ces deux disciples. Il leur fait faire tout un cheminement, et il chemine avec eux. Cette pédagogie demeure très actuelle pour toute vie spirituelle chrétienne, aussi bien personnelle qu’en communauté. Relevons-en les étapes essentielles.

D’abord, Jésus rejoint deux personnes qui font route ensemble, plongées dans la tristesse et l’accablement d’une dure épreuve qu’elles viennent de vivre. « Jésus lui-même s’approcha, et il marchait avec eux », nous dit l’évangile. Cette manière discrète de se faire proche et de marcher à notre rythme, Jésus la vit depuis sa naissance à Bethléem ; c’est ce qu’il a fait durant les 30 ans de sa vie discrète à Nazareth, et c’est ainsi que très souvent il aborde les personnes un peu marginales, dans sa « vie publique ». Il est curieux de constater que dans cette page, l’évangéliste Luc mentionne longuement –en style direct- tout ce que les disciples confient à Jésus, tandis que nous ne savons rien du détail de ce que Jésus leur dira ensuite ! Ne pas craindre de faire part au Christ du quotidien de notre vie, avec les joies mais aussi les peines et les poids que souvent nous devons porter… C’est pour entendre cela que le Fils de Dieu s’est fait homme, et depuis son incarnation, il marche à notre rythme, à notre écoute.

Ensuite, Jésus prend la parole à son tour, et leur donne un éclairage qui va faire le lien entre ce qu’ils viennent d’exprimer et ce qu’annonçaient Moïse et les prophètes. Il s’agit ici, comme les deux disciples le diront eux-mêmes plus tard, d’ « ouvrir les Ecritures ». Pas seulement ouvrir matériellement la Bible, mais laisser la Parole de Dieu se déployer pour qu’elle rejoigne, éclaire et réchauffe nos vies. Les disciples diront plus tard que « leur cœur était redevenu brûlant, tandis qu’il leur parlait sur la route » …

3e étape, qui aurait pu ne pas avoir lieu si les disciples n’en avaient pas expressément manifesté le désir : le repas partagé. « Reste avec nous », demandent-ils à Jésus qui fait mine de continuer sa route sans eux. Jusque-là, ils n’avaient pas décidé grand-chose : Jésus les avait rejoints et avait entamé la conversation en s’invitant à leur côté. Désormais, c’est à eux d’inviter Jésus. Pour aller plus loin dans la vie avec le Christ, il faut nécessairement qu’à un moment, ce soit véritablement notre désir, clairement manifesté. Il s’agit de souhaiter que la rencontre se poursuive et s’approfondisse, et souvent –dans la vie courante- cela se passe autour d’un repas.  C’est là que ces deux hommes vont reconnaître Jésus, lorsqu’il « rompt le pain », après l’avoir pris, béni et avant de le leur donner. L’allusion au dernier repas qui donne sens à la passion de Jésus est évidente, et pour nous cela renvoie explicitement à l’Eucharistie.

Dernière étape : l’enthousiasme retrouvé, ils reprennent la route de plus belle, malgré la nuit maintenant tombée, et ils portent le témoignage que Jésus est vivant ; ils en ont fait l’expérience. On s’imagine que, avant même d’ouvrir la bouche, ce témoignage se voit sur leur visage –eux qui sont passés de la tristesse à le joie d’un « cœur brûlant » ! La foi devient naturellement témoignage, dès qu’on a découvert le trésor qu’est le Christ vivant dans sa vie !

Ces 4 étapes peuvent être celles de toute notre aventure spirituelle avec le Christ, sans cesse reprise. Elles sont aussi celles de la messe du dimanche : l’accueil et la mise en présence du Seigneur (demandons-nous si nous avons quelque chose à déposer devant lui quand tout commence ; c’est une condition de fécondité pour les étapes suivantes…) ; l’écoute de la Parole de Dieu qui trouve son aboutissement dans le Christ et éclaire notre réalité quotidienne ; l’autre table que constitue la liturgie eucharistique et la communion au Christ dans son Corps et son Sang ; et enfin l’envoi et la mission : « Allez dans la paix du Christ ! »

Ressourçons-nous en Jésus dans cette dynamique, même si actuellement nous n’avons pas l’occasion de nous rassembler en tant que disciples du Seigneur !

Abbé Jean-Pierre Lorette

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